Rester chez soi en campagne : ressources et astuces pour une vie autonome et sereine

20 juin 2025

Comprendre les enjeux du maintien à domicile en zone rurale

Vivre sa retraite dans son foyer, c’est aujourd’hui le souhait affiché de près de neuf personnes âgées sur dix selon la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie). Pourtant, les zones rurales soulèvent des défis spécifiques :

  • Éloignement des services: pharmacies, médecins, commerces ou lieux d’activités sont souvent situés à plusieurs kilomètres.
  • Difficultés de transport: l’absence de transport en commun régulier et la perte d’autonomie au volant compliquent les déplacements.
  • Isolement social: en 2023, d’après l’Observatoire de l’isolement des seniors, 23% des plus de 75 ans vivant en zone rurale déclarent ressentir un sentiment de solitude au moins une fois par semaine (source : Fondation de France).

Ces défis ne sont pas une fatalité. De nombreux dispositifs, parfois méconnus, existent pour transformer ces obstacles en opportunités de vivre pleinement sa retraite à la maison.

Adapter son logement : petits gestes, grandes avancées

L’un des premiers leviers consiste à rendre sa maison plus sûre et confortable. Quelques aménagements, parfois très simples, peuvent faire toute la différence :

  • Barres d’appui et rampes pour sécuriser les escaliers, la salle de bain ou l’accès à la maison ;
  • Éclairage renforcé dans les couloirs et entrées pour prévenir les chutes, qui représentent 80% des accidents domestiques chez les plus de 65 ans (source : Santé publique France) ;
  • Douche remplacée par une douche à l’italienne plus facile d’accès, parfois prise en charge par l’ANAH ou via l’APA (Aide Personnalisée d’Autonomie) ;
  • Domotique (volets roulants électriques, détecteurs de mouvement, alarmes…) pour automatiser certaines tâches et rassurer la famille.

En Charente, les plateformes locales de rénovation énergétique et d’amélioration de l’habitat (SOLIHA, ADIL 16) accompagnent les seniors pour monter les dossiers de subvention et trouver des artisans labellisés. À noter : en 2022, près de 42 500 logements de personnes âgées ont été adaptés avec l’aide de l’État, en majorité en zone rurale (source : Ministère du Logement).

Se faire aider : les services d’aide à domicile et portage de repas

Même avec un domicile adapté, le quotidien peut nécessiter un coup de main, notamment pour les tâches ménagères ou la préparation des repas. Voici quelques solutions éprouvées :

  • Services d’aide à domicile : Auxiliaires de vie, aides ménagères ou aides-soignantes peuvent intervenir pour l’entretien du domicile, l’aide à la toilette, les courses ou l’accompagnement extérieur. En Charente, ADMR, UNA ou la Mutualité Française proposent ces services, financés partiellement par l’APA ou les caisses de retraite.
  • Portage de repas à domicile : Des organismes comme le CCAS, la Croix-Rouge ou des structures privées proposent des repas équilibrés, livrés jusqu’à chez vous, préparés parfois à base de produits locaux. Le portage de repas peut se combiner avec un passage quotidien rassurant.
  • Petits services annexes : courses partagées, compagnonnage, aide administrative, souvent organisés à l’échelle de la commune ou de la communauté de communes.

Selon la DREES, 61% des bénéficiaires de l’APA en Nouvelle-Aquitaine ont recours à l’aide à domicile au moins une fois par semaine.

Mobilité en zone rurale : se déplacer malgré l’éloignement

S’il est un frein souvent cité à la campagne, c’est bien la mobilité. Pourtant, des alternatives naissent :

  • Transports à la demande : De nombreuses intercommunalités, comme GrandAngoulême ou Cœur de Charente, proposent des minibus qui desservent les villages sur réservation téléphonique, à un tarif modique.
  • Covoiturage solidaire : Des plateformes collaboratives, telles que Rézo Pouce ou Mobicoop, facilitent les trajets occasionnels entre voisins, y compris pour les rendez-vous médicaux.
  • Taxis conventionnés : Pour les soins réguliers (kiné, hospitalisation de jour…), la sécurité sociale prend en charge les trajets prescrits médicalement.

En Charente, l’association Autonom’102 organise depuis 2018 des accompagnements en voiture pour des seniors non véhiculés. Le petit clin d’œil : lors d’une opération à Rouillac, en 2023, plus de 1 700 trajets solidaires ont été réalisés en un an.

Rester en lien : l’importance de la vie sociale et du numérique

L’accès à une vie sociale riche, même sans bouger de chez soi, est indispensable. Quelques solutions :

  • Clubs, ateliers, animations itinérantes : nombre de mairies et associations délocalisent bals, repas, ateliers mémoire, projections de films ou « cafés papote » dans les petites communes. Le Département de la Charente soutient « Les Maisons France Services » ambulantes, qui facilitent l’accès aux droits et créent du lien.
  • Initiation au numérique : la fracture numérique recule puisque 73% des plus de 65 ans utilisent désormais internet pour garder le contact avec la famille, consulter leur santé ou organiser des loisirs (source : INSEE 2023). Des conseillers numériques itinérants aident à s’approprier tablettes et smartphones, souvent gratuitement.
  • Permanences itinérantes de médiateurs sociaux qui interviennent dans les villages éloignés pour accompagner les démarches, briser l’isolement, et renforcer la solidarité de proximité.

Les dispositifs innovants « anti-isolement » : téléassistance et entraide locale

Parmi les solutions les plus utiles à la campagne, la téléassistance mérite d’être citée :

  • Bracelets ou pendentifs d’appel d’urgence, permettant d’alerter des proches ou une centrale 24h/24. Ce service, proposé par l’ADMR, la Croix-Rouge ou le Département en Charente, rassure autant les seniors que leurs familles.
  • Dispositifs « voisins vigilants » ou « voisins solidaires », où chacun prend le relais pour veiller sur ceux qui vivent seuls, organiser des visites, signaler tout changement d’habitude inquiétant. Ce modèle, remis à l’honneur depuis la crise Covid, a permis de réduire les situations critiques non détectées de 40% dans certaines communes (source : UNCCAS, 2023).
  • Applis de partage d’entraide : des initiatives locales, comme « Mon Super Voisin » ou « Voisins Solidaires », mettent en relation personnes âgées et voisins bénévoles pour aider à sortir les poubelles, bricoler, ou simplement papoter autour d’un café.

Connaître et activer ses droits : aides financières et accompagnement

De nombreux seniors n’osent pas faire valoir leurs droits, parfois par modestie, souvent par méconnaissance. Voici les principaux dispositifs accessibles :

  • APA (Aide Personnalisée à l’Autonomie) : allocation variable selon les ressources, attribuée par le Département, pour financer l’aide à domicile, l’adaptation du logement, le portage de repas… Plus de 8300 Charentais en bénéficient.
  • Prestation de compensation du handicap (PCH) : destinée aux personnes de moins de 60 ans ayant une perte d’autonomie durable.
  • Aides des caisses de retraite et mutuelles : soutien ponctuel pour des travaux d’adaptation, prise en charge de la téléassistance, ateliers mémoire, etc.
  • Caisse d’allocations familiales (CAF), Fonds d’action sociale, CCAS de la commune : aides exceptionnelles ou régulières pour faciliter le maintien à domicile.

Un conseil ? Prendre rendez-vous avec un conseiller France Services ou une assistante sociale pour faire le point sur ses droits et remplir, si besoin, les dossiers de demande.

Des solutions intermédiaires : la colocation et l’habitat partagé

Parfois, rester seul chez soi devient difficile, mais quitter la campagne à tout prix n’est pas la solution souhaitée. Il existe des alternatives chaleureuses :

  • La colocation entre seniors : vivre à plusieurs, dans une grande maison, permet de briser la solitude, de partager les frais et de mutualiser le recours à l’aide à domicile.
  • L’habitat inclusif : nouveaux concepts en Charente tels que les « béguinages » ou petites résidences à taille humaine, situées dans les villages, et conçues pour favoriser l’entraide, la convivialité, tout en préservant son autonomie.
  • L’accueil familial : de plus en plus de familles rurales accueillent à domicile, en contrepartie d’une rémunération, un senior autonome préférant une ambiance familiale à un établissement (cf. réseau Famidac).

D’après la FNADEPA, 8% des seniors Français envisageraient une solution d’habitat partagé dans les dix ans à venir.

Oser demander, s’appuyer sur le tissu local

La ruralité recèle un trésor : la proximité humaine, faite de petites attentions, de solidarité sans bruit, de sourires au marché ou à l’église. Multiplier les petits gestes, s’inventer de nouvelles habitudes, accepter l’aide et oser la demander, c’est la clé d’une retraite sereine et épanouie chez soi, en Charente comme ailleurs.

Entre nouvelles technologies, initiatives locales et entraide ancienne, la boîte à outils du maintien à domicile en zone rurale n’a jamais été aussi riche. En circulant sur les routes bordées de vignes, on sent bien que la campagne charentaise, loin d’être un désert, continue d’inventer, chaque jour, de nouveaux modèles pour vieillir debout, chez soi.

En savoir plus à ce sujet :